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( 25 février, 2018 )

Février 2018 : Bientôt la fin.

Vous le savez, chers amis des Cahiers, la Revue va s’arrêter au n° 40.

« Avant le premier numéro d’une revue, il y a toujours une histoire », écrivais-je en 2011 sur la première page de mon blog. La mienne fut assez exceptionnelle. Les amis qui m’ont suivi dans mon travail, à travers mes livres, le savent, qui ont lu mon Cocktail de vie (Éditinter) et Cl. C. un parcours littéraire atypique (451ème Encres Vives). J’ai fait, dans ma (déjà) longue vie, des rencontres extraordinaires, et vécu avec mes élèves des expériences hors du commun. Ma revue est née de tout cela.

Pour les deux derniers numéros, j’ai ressorti de vieux dossiers, repris des contacts, fait jouer des relations qui dataient des années 80-90. Bref, ce fut, cette fois encore, un grand plaisir et beaucoup d’émotion. Quand Monsieur Jaccottet vous autorise à publier dans votre modeste petite revue une lettre qu’il avait adressée à vos élèves en 1991, que dire sinon que vous êtes comblé. Bref, le Cahier 39 dont voici le sommaire devrait rester dans les mémoires.

Pour ce dossier sur l’écriture de la poésie,

Philippe Jaccottet répond à l’enquête des collégiens d’Ingrandes-sur-Loire.

Des poètes disent comment ils écrivent et proposent un de leurs poèmes. Ont collaboré Jean-Marie Alfroy, Pierre Perrin, Michel Diaz, Michel Passelergue, Claude Serreau, Bruno Thomas, Jean-François Forestier, Paul Couëdel, Jean-Claude Touzeil, Jean Pichet.

Noël Arnaud, en 1991, répondait aussi à l’enquête dans une lettre restée inédite jusqu’à ce jour.

Dans la 2ème partie du n° 39, nous avons, comme d’habitude, accueilli des poètes contemporains habitués des Cahiers et quelques nouveaux. Puis une savoureuse page d’enfance de Pascale Lavaur (humour et émotion), quelques notes de lecture et quatre pages intitulées « Rue Ventura ». Je livre là quelques impressions de lecture. Ces pages préfigurent ce qui viendra après la Revue. Car je n’imagine pas d’abandonner tout contact avec ceux qui m’accompagnent depuis les débuts et que j’appelle « Les Amis de la rue Ventura ». Affaire à suivre, donc !

Mon ami Patrice est de ceux-là. Il vient de m’adresser sa lecture de ce numéro un peu exceptionnel. J’ai plaisir à vous en proposer un fragment ici :

« Cher Claude, un grand merci pour … ce n° 39 des Cahiers. Le sommaire de couverture est impressionnant et, surtout, subtilement structuré. Riche idée que d’ouvrir le dossier « Des poètes disent comment ils écrivent » par la réponse de Philippe Jaccottet à vos élèves d’Ingrandes-sur-Loire en 1991 et de le clore par celle de Noël Arnaud la même année. Deux documents portés ainsi à notre connaissance, deux conceptions quasi à l’opposé l’une de l’autre mais, somme toute, complémentaires, puisque balayant bien l’immensité du champ que peut recouvrir l’écriture poétique.

Entre ces deux grands aînés, j’ai beaucoup apprécié le témoignage de l’ensemble des auteurs 2018. Simplicité et profondeur des propos de chacun… Mention particulière, en ce qui me concerne, pour Michel Diaz et Claude Serreau – Je retiens également, au passage la réflexion de Pierre Perrin (page 8) : « … Mais  surtout la recherche du nouveau par la table rase a perdu de vue non seulement l’efficacité sur le lecteur, mais jusqu’à la nécessité du sens. Ce qui prime aujourd’hui, c’est l’évanescence, le dit du rien, tout rythme, toutes images répudiés (…) » – réflexion qui, d’une certaine façon, rejoint la vôtre (page 60) : « Poètes, pourquoi pensez-vous que, pour écrire en poésie, il faut mettre de l’obscurité dans la phrase ? » -  Aucune obscurité dans ce dossier dont j’aime qu’il se termine par : « Je cherche l’apaisement », Jean Pichet touchant là, je crois, ce que nous cherchons pratiquement tous en écrivant…

… Joie, par ailleurs, de retrouver Michel-François Lavaur dans les deux pages, si justes, de Pascale. Et joie, aussi, que de lire l’analyse pertinente que livre Michel Passelergue sur votre Crépuscules. Et merci à vous, Claude, d’avoir publié la note de lecture que Claude Serreau a consacrée à mes Tessons… »

Merci, Patrice. Je ne manquerai pas de prévenir les amis lorsque sortira votre prochain livre.

Voici, pour éclairer mon propos, la première de couverture du Cahier n° 39…

1ère de couv du 39

Dans le Cahier n° 40, à paraître en mai ou juin, je pensais publier un texte que j’avais rédigé il y a quelques années, fruit de mon expérience de revuiste. Mais, devant l’importance des textes recueillis pour ce dernier numéro (le fichier est déjà prêt sur mon ordinateur), je me suis effacé. Cependant…

Retour sur un thème pour lequel j’ai beaucoup radoté, voici, extraits de cette « Lettre à un ami sur la poésie » un fragment dont la charge fera sans doute penser au combat que menait Jacques Charpentreau dans le cadre de sa revue Le Coin de table. Si je propose ce commentaire pour la seconde fois, c’est que, pour moi, le sujet est important. Il faut sauver la poésie !

« … Quand je lis « J’ai égaré ma vie à travers l’aveugle succession des jours… mot après mot dans le vertige de l’écriture j’ai tenté vainement de combler l’horreur du vide de me frayer un chemin au cœur de la douceur des choses », je m’interroge : est-ce de la poésie ? Pourquoi ne pas dire que ce n’est que de la prose ? Il y a des images, cependant. Mais n’a-t-on appelé cette phrase poésie que parce que l’auteur a égrené ce message sur 17 vers ! Oui, vous avez bien lu : 17 vers, très brefs. On a l’impression qu’étant, comme les feuilletonistes du 19ème siècle, payé à la ligne, il voulait gagner son pain du lendemain. Il faudrait d’ailleurs  se mettre d’accord sur ce qu’on appelle poésie. Mission impossible, nous le savons tous. Reste que le souci du poète devrait être, après son besoin de dire (qui est sans doute l’essentiel), le respect du lecteur. Est-il bon de le heurter, le choquer par quelque chose qui ressemble à une escroquerie ? Emporter l’assentiment de son lecteur, n’est-ce pas important, autant que le message, pour qui souhaite être lu, écouté, compris ? Dans le texte cité ci-dessus, je ne vois rien d’autre que la volonté de faire des vers (disposition qui, ici, n’ajoute rien au message) et un jeu gratuit sur « l’affreux peigne à dents cassées du vers libre ».

Quand je lisais pour la Revue des poèmes en prose tronçonnée, parfois j’étais tenté de les jeter dans ce que Jacques Charpentreau appelait le « monceau de vers libres qui s’accumulent dans les déchetteries de la poésie ».

Dans le même numéro du Coin de table, il ajoutait : « Le vers libre est apparu aux médiocres comme la possibilité de s’affranchir totalement de toute structure… il a ouvert une autoroute aux médiocres qui n’ont pas vu ses exigences ». Il avait la dent dure, le poète. Mais il faudra bien reconnaître un jour qu’il avait raison.

Sur ce, je vous quitte aujourd’hui.  Après la pluie, le soleil se lèvera, chantait Franck Fernandel dans « La caravane Pacouli », ce sympathique feuilleton  dont l’action se déroulait en Provence. Il est bien là ce matin, le soleil, pour le plaisir des amateurs de promenades poétiques, livre en main, quand le rythme de la marche vient épouser celui du poème. N’est-ce pas, Michel, vous qui, dans votre lettre ouverte à Cl. C. qui va paraître dans le Cahier n° 40 dites qu’il vous arrive d’emporter un de mes livres dans vos marches « sur les chemins… à l’heure incertaine du crépuscule ».

Louna, génie des lieux, rue Ventura, et son maître vous saluent et vous souhaitent un beau printemps de création, ensoleillé par la poésie.

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