( 20 août, 2020 )

Bonjour !

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Vous êtes sur le blog de Claude Cailleau, directeur de la revue « les Cahiers de la Rue Ventura ».

Un nouveau blog, à l’enseigne des « Amis de la rue Ventura et Claude Cailleau », a vu le jour.

Vous le trouverez à l’adresse suivante :

http://les-amis-de-la-rue-ventura.over-blog.com/2020/08/litterature-souvenirs-poesie.html

 

( 19 août, 2020 )

Ce 19 août 2020, pluie et soleil. Souvenirs, souvenirs…

Une nouvelle importante : je viens d’ouvrir un nouveau blog !  

Mais d’abord, comment vous remercier, vous qui, ces derniers jours, êtes encore venus sur ce blog ouvert en 2011 et non alimenté depuis février 2019 ? Les pics de visite m’ont impressionné.

Donc sachez que je viens d’ouvrir un blog différent :

http://les-amis-de-la-rue-ventura.over-blog.com/2020/08/litterature-souvenirs-poesie.html

Google ne l’a a encore signalé ; c’est l’abondance des visites qui va l’inciter à le faire vite apparaître sur la liste lorsque vous taperez « Claude Cailleau » ou « les Amis de la rue Ventura ».

Vous y trouverez des articles sur « mes écrivains », de l’autobiographie, et – comment s’en passer ? – de la poésie.

J’envisage aussi de proposer à mes amis poètes une tribune pour un de leurs textes ; et le projet reste ouvert aux suggestions. Vous savez que ma revue a donné la parole à des centaines d’entre vous.

Une précision encore… Revenez sur ce blog dans quelque temps : conscient qu’il est difficile parfois d’y trouver l’article que l’on cherche, je vous prépare un récapitulatif des textes publiés là pendant ces 9 années. À partir des thèmes. Cela pourra vous aider à aller plus vite dans votre recherche.

Merci encore, je vous souhaite une belle fin d’été à l’abri du fameux virus.

Claude Cailleau

( 6 mars, 2019 )

Printemps 2019

Un blog, ce n’est pas un site. Au temps de la Revue, plusieurs visiteurs m’ont dit avoir eu du mal à retrouver un article ou une information. « Tout est à la suite, ce n’est pas pratique, m’ont-ils écrit. Quand en 2011 je l’ai créé, c’était surtout pour assurer la publicité des Cahiers de la rue Ventura. Mission remplie si j’en juge par le nombre de visites quotidiennes pendant les dix ans de la Revue.

Maintenant, je pense plutôt à un site, qui offrirait une plus grande variété avec différentes rubriques et me permettrait d’accueillir des amis, je veux dire leurs textes, et des critiques d’ouvrages. Un support plus littéraire à l’adresse des curieux. Bref, j’y pense sérieusement. Sans hâte, afin de ne pas me tromper. Je vous donne rendez-vous au printemps, avec mon Anthologie poétique, qu’un éditeur a accepté de publier. Et peut-être encore une page dans le ton de celle-ci, cela dépendra de l’accueil que vous lui ferez. J’ai toujours eu l’impression, préparant les pages de ce blog, de venir bavarder avec vous, sans manières. Aujourd’hui, si vous continuez votre lecture, c’est à un retour en arrière que je vous invite à travers quelques

« Souvenirs d’un prof » 

(avec le stress, maîtrisé, mais stress quand même, des inspections – des événements que j’ai toujours redoutés, à une époque où la hiérarchie pesait plus lourd que maintenant, et où la tenue exigée était « chemise, veste et cravate » pour les hommes. C’est avec un plaisir non dissimulé que lors de la dernière visite d’un inspecteur dans ma classe – c’était à quelques mois de mon départ en retraite – bien que prévenu,  j’avais volontairement quitté ma veste. Quand il est entré, je lui ai dit : « J’aurais trop chaud avec ma veste, je bouge beaucoup pendant mes cours ; mais je peux la remettre si vous voulez ». Il m’a assuré que cela ne le gênait pas. On était en 1996)

Quarante ans au service de l’Éducation Nationale, ça compte, tout de même. Et les milliers de gamins à qui j’ai essayé d’apprendre quelque chose. Même si mes inspections ont toujours été heureuses, ce sont surtout des visages, des réponses d’élèves, de petits événements de classe qui me restent en mémoire et nourrissent parfois mes rêves. Mes insomnies, aussi.

Les inspections ? je n’en ai eu que cinq en 40 ans de carrière ! Ou les inspecteurs étaient très occupés, ou je ne les intéressais guère.

La première (j’étais le maître, débutant, des CP, CE1, CE2 d’une petite école de campagne) a commencé d’une façon plutôt originale…

Il faut dire qu’à cette époque, les inspecteurs arrivaient à l’improviste. Personne n’était prévenu. Les choses se sont bien humanisées depuis ces périodes quasi moyenâgeuses. J’étais donc dans ma classe, en plein cours d’écriture avec les CE, les plus jeunes occupés à autre chose. J’entends frapper à la porte vitrée et je vois un homme (environ 40 ans), qui attendait sagement que je l’autorise à entrer. Il avait une serviette et portait un long imperméable mastic et un chapeau. Le parfait aspect d’un voyageur de commerce. J’ouvre et je commence : « Excusez-moi, je ne peux pas vous recevoir : je suis en plein travail avec mes élèves. Nous pourrons nous voir à la récréation. » J’entends alors une petite voix, presque timide qui murmure : « Mais je suis l’Inspecteur ».

Un peu désarçonné, je l’installe au fond de la classe devant une petite table d’enfant et je reprends ma leçon. Le gentil inspecteur, qui avait pu constater que pendant mon travail je laissais dehors les importuns, après m’avoir écouté pendant une heure, m’a gratifié d’un 13,5 sur 20, tout à fait honorable pour un débutant, m’a-t-on dit.

Le deuxième, je lui avais demandé de venir (j’étais déjà en charge de cours dans un collège). J’avais appris que j’allais être incorporé en septembre. On était en mai ; avant de quitter l’enseignement pour deux ans, j’espérais voir ma note d’inspection monter un peu, puisque les promotions dépendaient de ces notes. Il est arrivé furibard : « Je viens, puisque vous m’avez appelé !» Bon début ! J’avais fait des efforts, choisi les cahiers de la meilleure élève, une fille de 12 ans, soigneuse, dont les devoirs étaient calligraphiés. Les enfants, ce jour-là, se sont montrés brillants ; tout s’est passé de façon idyllique, mais notre homme, qui n’aimait pas qu’on lui dicte une conduite, ne m’a généreusement gratifié que d’un demi-point supplémentaire.

Parti pour faire deux ans d’armée, j’ai été libéré au bout de 18 mois, la guerre d’Algérie venant de se terminer. Libéré avec le grade de sergent, dont on m’a honoré le dernier jour afin de ne pas avoir à me payer ; auparavant, brillant 2èmeclasse, je recevais pour tout salaire, chaque mois ou chaque semaine, je ne sais plus, six paquets de caporal ordinaire, du gros gris à rouler, et quelques paquets de cigarette, moi qui ne fumais pas. De quoi me flanquer un cancer du poumon si j’avais éclusé tout ça.

Et mon inspecteur d’avant l’incorporation est revenu me voir. Cette fois j’avais été prévenu. Car notre homme n’était pas seul : il venait accompagné d’un inspecteur général, un vieux bonhomme à qui je donnais plus de 70 ans ( ?) et qui m’a serré la main en me broyant les doigts pour me montrer qu’il avait encore un reste de vigueur. Car, ce jour-là, c’était mon inspecteur qui se faisait inspecter !

« Excusez-moi de vous infliger ça », m’a-t-il soufflé en aparté. Mais je l’ai soupçonné de m’avoir choisi à dessein. Se souvenait-il de sa précédente visite ?

J’avais copié au tableau un bref texte de Colette que je voulais faire découvrir aux élèves. Je commence mon cours. Devant, à la première table, une petite élève, Noëlle, la plus jeune et la plus brillante, me regarde. Me fait des signes que je n’arrive pas à interpréter. Elle ne lève pas sa main comme le faisaient les élèves quand ils souhaitaient parler, non, elle montre le tableau. Tout en parlant, je finis par regarder mon texte et… j’y découvre une belle faute d’étourderie, un t au lieu d’un s à la fin d’un verbe ! La gamine, qui a deviné qu’aujourd’hui il se passe quelque chose, n’a pas voulu mettre son professeur en difficulté. Elle n’a rien dit. La correction faite, discrètement, je la vois esquisser un petit sourire. Apparemment personne n’a rien vu. Je la regarde, une petite complicité vint de se tisser entre nous deux.

Cette fois, mon inspecteur m’a noté plus généreusement : 16, à 27 ans, c’était, disons, honorable.

Le troisième, qui avait annoncé sa visite à 10h, est arrivé avec 20 mn de retard, bousculant l’ordonnancement de mon cours, perturbant mes élèves, des  3ème en difficulté. Arrivé en retard, mais pas question pour lui de demander qu’on veuille bien l’excuser ou au moins fournir une explication. Je tentais de décortiquer avec ces ados peu doués mais gentils  les ressorts de la scène 3 acte I des Femmes Savantes. Je n’ai jamais eu de chance avec cette pièce. Deux fois j’ai dû l’affronter, au BEPC d’abord, au concours de l’École Normale ensuite. Avec le même succès mitigé. Pardonnez-moi de ne pas aimer Molière. Mon inspecteur m’a (nous a) écouté(s) pendant une demi-heure ; puis il est parti devant les gamins médusés dans un grand discours, commentant les paroles de Clitandre et d’Henriette avec enthousiasme et véhémence. Content de sa prestation, il a ajouté : « Voilà comment j’aurais procédé ». Et, dans son rapport, il m’a (s’est) gratifié d’un brillant 18,5 ! C’était 2 points et demi de plus que la note précédente. J’étais comblé ! Et surpris : le déroulement de la séance m’avait plutôt laissé penser que ma note allait plonger. Je n’ai jamais demandé à mes élèves s’ils avaient compris quelque chose à ses explications.

Quelques années plus tard, en 1979, un nouvel inspecteur est venu me voir. Un homme charmant, très courtois, qui m’a observé, écouté pendant une heure. J’avais des petits sixièmes pas très éveillés, mais adorables, qui faisaient tout ce qu’ils pouvaient pour me satisfaire. Je vis mon visiteur sourire de temps en temps aux bourdes proférées en toute innocence par quelques garçons que la bonne atmosphère de la classe poussait à s’exprimer. Il a aimé, je pense, que je ne les rabroue pas. Mes élèves sortis, il m’a interrogé sur le travail que je faisais avec les troisièmes. Un mois plus tard, son rapport m’est arrivé, lequel se terminait par une formule qui m’a vraiment fait chaud au cœur : « M. Cailleau est un professeur exceptionnel ». Ma prestation était créditée d’un 19 qui a causé quelque jalousie chez mes collègues curieux de connaître ma note.

Puis… Puis… on m’a foutu une paix royale. Excusez la vulgarité du terme en italique. Mais c’était quand même exceptionnel : pendant 16 ans, je n’ai pas vu un inspecteur franchir le seuil de ma classe ! Ce qui ne m’a pas empêché de travailler avec enthousiasme et conviction… et même de commencer à animer, bénévolement, et pendant mes heures de liberté, des ateliers littéraires dans les collèges où j’enseignais, pour mettre mes élèves en relation avec les écrivains dont ils aimaient les livres. De belles expériences dont je suis fier et qui m’ont valu des lettres comme celle-ci, tenez, reçue en 1992 d’un élève de seconde qui avait participé à mon atelier d’Ingrandes-sur-Loire l’année précédente, lettre qui commençait par ces mot : « Monsieur, un an s’est écoulé, mais je ne vous ai pas oublié. » Ces expériences m’ont valu aussi les propos aigres de collègues sans doute jaloux du succès de mes entreprises. Déjà, en début de carrière, on m’avait traité de « poire » en me voyant accepter de remplacer à titre gracieux un collègue absent et assurer quelques heures pour aider la directrice du collège. Dans les dernières années, devaient penser la même chose de moi ceux qui me disaient : « Moi, je suis payé pour faire 18h, je n’en ferai pas 19 ! » Belle mentalité ! Et qui me regardaient « en coin » quand les journalistes et la télé s’intéressaient à mes animations.

Je termine… le dernier inspecteur, qui m’a fait sa « visite de courtoisie » à six mois de mon départ en retraite, a eu la délicatesse de commencer son rapport en ces termes : « Cette visite n’avait pas pour objet le contrôle du travail de M. Cailleau. » Il eût été un peu tard pour envisager de me faire progresser ! Je tenais à lui montrer tout ce que j’avais fait dans mes classes : j’avais transporté à son intention des cartons de préparations, fiches et documents, et surtout le courrier échangé avec les écrivains et les numéros des revues que je publiais avec mes élèves. Au bas d’un rapport très élogieux, il a conclu : « Je ne puis que reprendre la formule de M. P. en 1979 : « M. Cailleau est un professeur exceptionnel ».  Et de m’accorder un nouveau 19 tout neuf !

Trêve d’autosatisfaction : je pensais qu’il aurait pu aller jusqu’à 20 ! Mais je suis tout de même très fier de cette reconnaissance. Il m’arrive de temps en temps, quand je déprime, de relire la belle prose de ce Monsieur qui venait de Nantes inspecter un vieux prof sarthois sur le départ, sans intention de contrôler son travail. Et qui confirmait le 19 de 1979. Grâces lui soient rendues, d’avoir reconnu qu’en vieillissant je n’avais pas décliné !

Je l’ai dit quelque part : avec mes souvenirs de prof, je pourrais faire un livre. Je m’arrête là : Catherine, qui se charge de publier mes textes sur le blog, me dit souvent qu’ils sont trop longs ; elle a raison, nous sommes à une époque où le temps c’est de l’argent. Seuls les retraités, des gens perpétuellement en vacances, peuvent se permettre de l’oublier ( ! )

Ah, vous êtes encore là ! Vous m’avez suivi, lu jusqu’à la fin ? Pour vous remercier, un petit retour en arrière : vous savez… quand les vieux le dimanche s’ennuient parce qu’il pleut et qu’ils ne peuvent emmener leur chien pour sa promenade dominicale… la première photo, c’était au temps des inspections. C’était dans les années soixante » – la seconde, … quarante ans ont passé, la moitié d’une vie, et je ne sais qu’en penser.

Vous retrouverez la citation en italiques dans mon Anthologie poétique à paraître prochainement, un bilan qu’a voulu vous offrir votre serviteur, «  le  retraité de la poésie ».

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( 3 janvier, 2019 )

Janvier 2019. Une nouvelle année…

Mon Anthologie poétique doit paraître au printemps. Pour ce livre, le choix a été douloureux et salutaire. Beaucoup de textes sont restés sur le bord du chemin. Au terme de ma recherche en poésie (j’ai tout testé : le vers classique, le vers dit libre, le verset, la prose), il me reste l’espoir d’être lu par quelques-uns, compris, et peut-être d’exister dans un futur où je ne serai plus.

Au moment où j ‘abandonne l’écriture de la poésie, j’ai souhaité redire ce qui me guide dans la préparation d’un livre. Je sais, certains vont vous souffler que je radote. Je n’ai aucune amitié pour ces gens-là et je veux bien courir ce risque. J’ai été affronté à tant de problèmes en gérant ma revue Les Cahiers de la rue Ventura, à cause de l’ego surdimensionné (certains disent : « gonflé à l’hélium ») de soi-disant poètes (soi-disant, pasprétendus, j’espère que vous voyez la différence, laquelle la plupart des jeunes blancs-becs formés actuellement par les universités sont bien incapables de sentir) tant de problèmes, donc, que je préfère m’adresser à quelques-uns, oubliant les autres. Et je repense à Julien Gracq affirmant que dans quelque vingt ans, il n’y aura plus de lecteurs pour des livres comme En lisant en écrivant (sans virgule, le titre, tenait-il à souligner), parce que les auteurs dont il parle dans cet ouvrage, plus personne ne les aura lus.

Je sais, je ne suis pas un grandpoète ; le hasard ( ? ), et mes choix dans les années 70 ont fait que mon (petit) coup d’éclat de 1971 ( un prix de l’Académie Française, suivi d’une entrée dans une superbe Anthologie parue chez Hachette – je m’y trouvais aux côtés de Victor Hugo, Heredia, Michelet, Loti, Flaubert, Mac Orlan, Chateaubriand, Alexandre Dumas, et beaucoup d’autres. Quel honneur ! L’anthologie avait pour titre Océan d’Armorique ; on peut y lire des extraits de mon roman Stef et les goélandssorti chez Julliard en 1971)… mon petit coup d’éclat (excusez-moi : il faut remonter très haut dans ce texte pour raccrocher ce 2ème coup d’éclat au premier – pour vous y aider, je les ai mis en gras) fut suivi d’une entrée dans le silence. Tenez, une petite confidence : l’explication de ce silence de 27 ans se trouve peut-être dans les dernières pages de Stef et les goélands. Il faut savoir lire entre les lignes, comme on dit parfois.

Ce livre, paru aux Éditions Julliard est épuisé ; mais Amazon le propose encore, d’occasion, pour trois ou quatre euros. Il fut tiré à 4000 exemplaires et l’éditeur me paya des droits d’auteur sur 2000 exemplaires. Il y en a donc 2000 dans la nature. Demandez-le autour de vous. Stef est partout et ça me fait bien plaisir. Si vous vous y prenez bien, je pourrai peut-être vous en procurer un : j’en avais racheté quelques centaines à Julliard avant qu’il ne pilonne. Il doit m’en rester quelques-uns dans mon grenier…

Mais revenons à mon propos des débuts de cette page. Excusez-moi de m’être égaré. C’était voulu. Tout ce qui est dit là est d’ordre confidentiel, à destination de mes amis. Vous en êtes puisque vous me lisez, en ce moment. Sachez qu’il se peut que cette publication, ici, soit la dernière. Donc…

Je me répète…

Mes ouvrages en poésie ne sont pas des recueils, mais des livres. Souvent, les poètes écrivent de courts poèmes qu’ils rangent dans une chemise. Quand ils pensent en avoir assez, ils relisent, essaient de classer (sans toujours y parvenir) : Le résultat est un recueil. Je donne souvent comme exemple de ma façon de procéder mon livre intitulé Le Roman achevé. À l’origine, un poème (le mot est au singulier) de 2638 vers, composé de 16 suites. La journée du poète, de 5h à 20h… le quotidien, les souvenirs qui lui reviennent, les livres qu’il ressort de sa bibliothèque, ses auteurs de chevet, ses rencontres du jours, la vie tout simplement. Cet ouvrage est d’abord paru sous forme d’un livre d’artiste tiré à 95 exemplaires. Très vite épuisé, il a été repris par un éditeur en édition courante. Pour la circonstance, j’ai réécrit le texte en versets. Et j’ai gardé à l’adresse des curieux les six versions manuscrites de ce Roman achevé(clin d’œil, on l’aura compris, au Roman inachevé d’Aragon) Si je n’avais utilisé que l’ordinateur, les traces de ce travail auraient été perdues. J’aime montrer à ceux qui viennent me voir rue Ventura les différentes versions du  grand poème. On y voit les corrections, les ajouts, les remords d’un artisan du verbe comme il a plu à un ami de me qualifier. Peut-être ce travail intéressera-t-il un jour quelque chercheur en poésie. Un jour, quand je ne serai plus. Et, par la grâce d’une curiosité à satisfaire, je revivrai un moment.

Je souhaite à tous une belle année 2019 

 

Ce qui suit va ressembler à un adieu…

Voici cinq photos liées soit à des moments, soit à des lieux importants de ma vie.

La première, datée juillet 1963, a été prise sur le pont de la Laïta, dans le Finistère. Nous étions jeunes, ma femme et moi ; nos enfants, petits. La Bretagne est certainement ma patrie de cœur. Plus que la Sarthe, mon département natal. Je suis pourtant revenu vivre à 500 mètres de la maison où je suis né. On est ancré, sans l’avoir voulu, dans un lieu, une province.

Mon premier roman, Stef et les goélands, est situé à Port-Louis, le port breton où je me suis marié, en 1958. La 2èmephoto a été prise par la libraire de Sablé en 1971. Lors de la parution du livre, elle était venue chez nous me photographier à ce qui était à l’époque ma table de travail, au rez-de-chaussée de la maison. Elle a fait agrandir la photo qu’elle a installée dans sa vitrine. En ce temps-là, les libraires avaient une haute idée de leur métier. Peut-être peut-on parler d’une qualité qui n’existe plus maintenant : la conscience professionnelle…

La troisième… c’est toute une histoire. Nous étions en vacances à Port-Louis. Nous flânions un soir quand, arrêté devant la devanture d’un bouquiniste, j’ai dit à ma femme : « Mais…  c’est un de mes poèmes, là dans la vitrine… » Nous sommes entrés et le libraire nous en a montré d’autres, dans une belle écriture gothique, noire. C’était bien signé de mon nom ! Et vendu quelques francs le feuillet. J’ai cru rêver. Sans révéler mon identité, j’ai demandé à l’homme qui vendait ces poèmes. Et j’ai pu entrer en relation avec une femme (au nom en ec, bien breton – je ne la nommerai pas ici) laquelle pratiquait (sans le savoir, ou en le sachant) une activité tout à fait illégale. Moi, j’étais plutôt content que quelqu’un aime mes poèmes au point de les écrire en gothiques et de les vendre. Nous sommes donc entrés en relation avec cette dame ; nous avons sympathisé  et son mari, ancien officier de marine, nous a emmenés sur son bateau faire le tour de l’Île Saint-Michel, un bout de roc situé à l’entrée de la rade de Lorient. Il y eut là, au Moyen-Âge, un prieuré et au 19èmesiècle un lazaret (on y descendait les lépreux avant d’aborder à Lorient). Pendant la dernière guerre, les Allemands avaient miné l’île qu’il fallut nettoyer après 1945. J’avais situé plusieurs scènes de mon roman  Yves en hiver (toujours inédit) sur cette île et je voulais la parcourir afin de rendre plus authentiques les scènes de mon livre. J’ai donc écrit à l’Amiral de Lorient pour demander une autorisation. Celle-ci me fut refusée mais, avec beaucoup de gentillesse, l’Amiral m’envoya plusieurs vues aériennes qui donnent une idée précise des lieux. Peut-être un jour reprendrai-je ce livre. Lors de la mini croisière autour de l’île, l’ancien officier de marine nous mitrailla avec son appareil photographique comme si nous étions des gens importants ; vous trouverez en 3èmeposition une de ces photos avec l’île en toile de fond.

La 4ème est datée 1980 : nous habitons depuis quelques années à Souvigné, dans la grande maison que nous avons fait construire au sommet du coteau pour abriter notre famille qui s’est agrandie. Toutes les pièces de vie sont au rez-de-chaussée : à l’étage, trois pièces seulement, mais très grandes : une salle de jeu (elle va vite devenir salle d’études pour nos enfants qui ont vieilli), un jardin d’hiver et à l’avant, la pièce où j’écris, avec ses murs habillés de livres jusqu’au plafond et sa fenêtre qui donne sur le village blotti en bas de la pente, le long de la Taude sa petite rivière. Nous sommes jeunes encore, ma femme et moi – la quarantaine – devant un ananas qui a poussé là, dans la tiédeur et la vive lumière de cette pièce à la température méridionale, été comme hiver ; nous y ferons même pousser un clémentinier qui aura des fruits, comestibles. J’aime regarder cette photo sur laquelle nous avons encore la minceur de la jeunesse.

Dernière image d’une vie : nous habitons dans notre maison de la  rue Ventura, dont il aura été beaucoup parlé en France et à l’étranger (j’exagère à peine) avec la revue que j’ai créée en 2008, Les Cahiers de la rue Ventura. Ici, deux fois nous avons eu la visite de France 3 venue interviewer le poète et les « facteurs » de la Revue. Je suis debout devant quelques rayons de ma bibliothèque. À plat sur le rebord du meuble à ma droite, un exemplaire de mon livre sur Reverdy et à gauche une sculpture venue tout droit du Burkina Faso où vit le père de mon petit-fils le métis. J’ai en main le premier volume des Faux-Monnayeurs de Gide, dans la Collection Pourpre, l’ancêtre, si je peux dire, du Livre de Poche, avec son format un peu réduit et son prix abordable pour le maigre budget d’un ado pauvre comme Job dans les années 50. Cette photo, que les lecteurs retrouveront dans le livre que je prépare sur mes écrivains de chevet, réunit le présent et le passé. Il y a quelques années, j’ai publié un texte sur Le Mans dans le magazine La Vie Mancelle. Lequel texte j’avais intitulé « Ma promenade dans la ville est un voyage dan le temps ». La photo que vous allez voir en 5 illustrait cet article.

C’est tout, pas grand-chose. Quelques jalons d’une vie au moment de finir.

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( 31 octobre, 2018 )

Automne 2018 – Quand reviennent les frimas…

Que le lecteur me pardonne : cette page fera une grande part aux sentiments. Une disparition m’a toujours amené à m’interroger sur moi-même, autant dire « à sonder l’insondable ». Et attendre. Attendre que le temps fasse son œuvre. Qu’il répare, car c’est toujours lui le coupable.

Pour répondre à une demande que m’avait faite un éditeur il y a quelques années, j’avais commencé la rédaction d’un ouvrage sur « mes » écrivains. La mort de notre petite chienne le 31 juillet a tout arrêté. Incapable d’écrire, j’ai décidé de m’atteler à une autre tâche : la préparation d’une anthologie de mes poèmes depuis mes premières publications en revues. C’était en 1956. La date me donne le vertige. J’ai donc relu, et choisi. L’affaire est en bonne voie. Et je pense toujours à ce livre que j’aimerais voir paraître avant de mourir : ce Journal qui s’écrit depuis 1995, depuis que j’ai mis le feu au précédent qui ne me convenait plus du tout.

Je viens de ressortir d’un dossier l’article qui m’avait été demandé par le président de l’Association pour l’Autobiographie (APA) pour sa revue La Faute à Rousseau. Le texte est paru dans le n° 35 en février 2004. Le voici. Je ne vois rien à y changer.

 

Journal intime, journal extime  

Un jour de 1995, j’ai pris le paquet de feuilles et de cahiers sur lesquels depuis 25 ou 30 ans j’écrivais ce que j’appelais « mon journal ». J’ai tout éparpillé dans ma brouette métallique et j’ai regardé partir en fumée le miroir de ma vie. Un ami à qui j’en parlais a eu la gentillesse de me dire que je venais de faire « une grosse bêtise » (le terme qu’il a employé était moins distingué).

Ce Journal, je pense que j’y étais moi-même, aussi vrai que nature, et je ne l’aurais fait lire à personne, pas même mes proches. L’écriture ayant toujours été pour moi – comme pour Roger Martin du Gard, que je considérais comme mon maître en ma jeunesse – le moyen le plus efficace que l’on ait imaginé pour échapper à une mort totale, je me suis dit que ce journal était parfaitement inutile puisque je ne voulais pas qu’il soit lu.

C’est cette année-là que ma conception de l’écrit personnel a changé. Ma vie extérieure, celle dont tout le monde pouvait être témoin, et ma vie intellectuelle, j’acceptais d’en parler et qu’on me lût. Mais je voulais protéger mon être intime et mes proches de la curiosité malsaine d’un lecteur occasionnel.

Je me rappelle mon attente impatiente du Journalde Martin du Gard, et mon irritation lors de sa parution à partir de 1992. « Par suite de certaines complications de ma vie conjugale, il se trouve que ce Journal est surtout le récit de mon existence familiale », écrivait l’auteur en août 1951 (t. II, page 4). C’est bien ce que je lui reproche. Et la belle justification de cette attitude, que présente Claude Sicard dans l’introduction du tome I, ne me fera pas changer d’avis. Autant m’avaient intéressé les « Souvenirs autobiographiques et littéraires » en tête de l’édition de la Pléiade, autant la lecture du Journal m’a laissé sur une impression de malaise. Je note aussi que l’auteur avoue « avoir songé sérieusement à le brûler ». Et cela « pour des raisons intimes » (t. II, p. 3). Le lecteur appréciera.

Je n’aime pas les journaux trop personnels. Subjectivité, mensonge, complaisance imprègnent ces récits faits au jour le jour, pour le bonheur du diariste.

Mon journal offert à la lecture (j’en ai déjà déposé deux tomes à l’APA) résulte donc d’un choix. Je n’ai pas pris modèle sur le Journal extimede Michel Tournier, qui n’a été publié qu’en 2002. Mais je me suis reconnu dans les choix de cet écrivain. « Tout m’intéresse, sauf Michel Tournier », a-t-il dit dans une émission de télévision. Ce qui ne l’a pas empêché de s’engager de temps en temps sur la voie d’une confidence, parfois consciente, parfois involontaire. « Extime », son texte ne l’est qu’à moitié.

Me trouvera-t-on dans mon Journal ? Rien n’est moins sûr. Si Tournier dit aussi « je ne mets rien de moi dans mes livres », je crois qu’on me trouverait plus dans mes poèmes – ce que j’appelle de l’autobiopoésie, une forme de lyrisme qui m’est personnelle, je crois. – ou dans ma Chronique, œuvre étrange, inachevée, où j’ai réuni tous les personnages de mes romans, et moi-même en commerce avec eux.

J’évoquais, commençant ce texte, le mouvement d’humeur qui, un jour de 1995, me fit anéantir 30 années de mon Journal. Échappèrent à cette furie de destruction deux cahiers de 100 pages 21 X 29 à petits carreaux, deux agendas grand format de 1989 et 1990 (les années où j’avais quitté mes élèves pour prendre un poste de documentaliste), un semainier (sans date !) et quelques feuillets plus anciens, oubliés dans un classeur. Enfin, le cahier noir et gris (les couleurs m’avaient séduit par leur sobriété) sur lequel j’écrivais depuis le début de 1995.

C’est en feuilletant ces cahiers, et me souvenant du Temps immobile de Claude Mauriac, que m’est venue l’idée d’un montage. Il m’a paru intéressant de rapprocher des textes rédigés à des époques différentes, mais qui traitaient de thèmes voisins. On voit mieux ainsi, me semble-t-il, la continuité d’une pensée et les nuances, les remords, qu’une relecture peut susciter. Je ne sais pas si j’aurai le courage de faire le même montage avec les douze gros cahiers de 180 pages remplis par la suite.

Je voudrais, pour terminer, évoquer à nouveau l’écrivain qui a enchanté mon adolescence quand, préoccupé par des problèmes de religion, de croyance, que je n’arrivais pas à résoudre seul, je suis tombé surJean Barois, son premier livre publié par Gallimard. S’en est suivi un échange de correspondance avec l’auteur, lequel m’invitait, quelques mois plus tard, à venir passer une journée avec lui au Tertre, près de Bellême. C’est là que pour la première fois de ma vie je pus voir, étalés sur une table basse dans sa pièce de travail, les feuillets manuscrits d’un journal d’écrivain. Il préparait alors avec Marie Rougier l’édition de ses œuvres dans la Pléiade, plus précisément, ses « Souvenirs autobiographiques et littéraires » dont je parlais précédemment). Des feuilles blanches 21 X 27 (le format utilisé à cette époque), couvertes d’une écriture qu’encore aujourd’hui je reconnaîtrais entre mille. L’encre noire me semblait – ainsi que la belle écriture – donner aux textes un sérieux, une authenticité qui, sur l’heure, m’impressionnèrent. Mais ce qui me frappa surtout, c’est la place occupée par ces textes dans la page. Une colonne étroite au milieu, et des marges immenses de chaque côté, où parfois surgissait une correction de la même encre. On voyait aussi de nombreuses marges vierges, révélant qu’à certains moments l’écriture s’était faite plus facile, ou que l’auteur n’avait pas relu ces passages. J’observais tout cela avec surprise, moi qu’on avait habitué à ne pas gaspiller le papier, comme on ne gaspillait pas le pain dans mon enfance.

C’est avec Roger Martin du Gard, donc, que je voudrais terminer. « Je vis à la fois dans l’obsession quotidienne du temps qui fuit…, et dans une incroyable légèreté, une inconcevable inconscience, gaspillant mes jours comme si je me sentais éternel », écrit-il dans son Journal le 11 juillet 1948. Il ne savait pas qu’il n’avait plus que 10 ans à vivre. Revenant en arrière, je me dis que moi aussi, pendant une trentaine d’années, j’ai gaspillé mes jours. Peut-être que mon Journal, plus intellectuel que sentimental, est une tentative un peu désespérée pour rattraper ce temps perdu. Les jours où m’afflige la pensée que la diffusion de mes écrits reste confidentielle, je me dis que j’écris pour le futur, que mes lecteurs seront dans un autre siècle. Parce que, comme Gide, « je ne crois pas à une autre survie que celle dans la mémoire des hommes ».

(J’ai placé ce texte en introduction de mon Journal de 1995, déposé à l’Association pour l’autobiographie)

Louna, notre petite chienne disparue en juillet, fut une adorable compagne.  Silencieuse mais si présente. Il est normal qu’elle trouve une petite place sur ce blog. Elle aussi restera dans notre mémoire.

« Onze années de vie

à se parler sans rien dire :

C’est ma chienne, morte. »

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3 Juillet – Page de journal…

Je n’ai rien contre le monde paysan. Je respecte ces hommes  de la terre sans qui nous ne pourrions vivre. Mon père a commencé sa vie de travailleur, à 8 ans (oui, vous avez bien lu !) comme bicard dans une ferme avant de devenir ouvrier agricole. Quand nous habitions à Souvigné, nous entretenions des liens d’amitié avec des agriculteurs à la retraite. L’un d’eux occupait ses loisirs à faire des mots croisés. Et pas les plus faciles. Non, je n’ai rien contre les paysans. Mais, quand même…

Dimanche, un salon du livre dans un petit village de la Sarthe. Une grande salle. Tout autour, des tables couvertes de livres ; assis derrière les stands,  les auteurs attendent le chaland. Au milieu de l’espace, des tableaux de tous les styles ; production des peintres de l’endroit. Peu de visiteurs. Entre un type, pur produit du terroir, la casquette sur le front, la clope aux lèvres, accompagné de sa femme, une grosse petite paysanne aux tétons bien gonflés. Regard circulaire, appuyé, sur les tables et les écrivains. En moi, l’impression désagréable d’être au zoo l’animal qu’on vient voir par curiosité. Mais très vite notre homme, d’une voix tonitruante :

« Viens t’en, la Mère : y a rin là n’ dans ! »

Il a pourtant dû aller à l’école, ce type pour lequel les livres n’existent pas. À chaque fois que je raconte cette anecdote, tout le monde rit. Moi, ce jour-là, très tôt j’ai rangé mes livres et je suis parti. Quelle tristesse !

30 mai – Page de journal

Je n’aime pas beaucoup la poésie de Jean Cocteau. Elle ne correspond pas à l’idée que j’ai de cet art. Seuls le rythme et la rime souvent font croire à de la poésie. Derrière les vers s’accumulent des flots de banalités, servies avec la langue de la prose. Si, comme le dit Octavio Paz, la poésie est « un langage dans la langue », la poésie de Cocteau n’en est pas. En poésie, le mystère est là, dans la langue du poème. Pourquoi l’écrivain change-t-il de matériau (non, c’est le même, mais employé autrement) lorsqu’il commence l’écriture d’un poème ?

Quand je relis les miens, qu’ils soient en vers ou en prose, je vois bien que quelque chose diffère de mes autres textes, fragments de romans ou d’essais. Et que cette langue très particulière est venue sans effort de ma part, sans recherche – mystère de la création poétique. Ce « autre chose », je ne sais pas l’analyser. Mon poème naît d’abord d’une attente ; quand il arrive, je le regarde souvent avec surprise. Et ce n’est pas fini : je vais le lire, le relire, le torturer, lui faire rendre gorge, jusqu’à ce qu’il s’avoue vaincu. Vaincu dans un combat qui souvent confine au massacre. Quand encore le poème survit. Il arrive qu’il atterrisse dans ce qu’un jour j’ai appelé « la corbeille papivore ».

C’est pourquoi la préparation d’une anthologie est un exercice salutaire : le choix des poèmes à garder suppose des déchets. Et il y a plus de déchets que de poèmes choisis. Arrivé au terme de cette sélection pour mon dernier livre de poésie, je constate que l’ensemble couvre 130 pages. Est-ce trop encore ?

Dans les années 70, en vacances dans le Sud-Est de la France, nous nous arrêtons devant un artiste des rues qui, pour gagner sa chienne de vie sans doute, proposait aux badauds de les « croquer » en un quart d’heure. Habile, notre homme : je me reconnais bien dans son dessin. Le cheveu rare déjà, et le regard qui plonge au-delà. Une belle ressemblance. Je n’ai pas trouvé trace de cet artiste sur la Toile. Peut-être a-t-il fini, éternel crève-la-faim, dans un refuge pour clodos (on dit SDF maintenant). Et vous, le connaissez-vous ? Il signait Cardus. Qu’est-il devenu ?

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( 29 juin, 2018 )

Juin 2018 – Le vieil homme se souvient…

Sommaire :

1 – Patrice Angibaud a lu mon livre.

2 – Je reviens sur mes chemins de lecture…

3 – j’ai choisi pour vous quelques pages de mon journal.

 

Le vieil homme qui se souvenait… (Éditions Encre Bleue)

Mon ami Patrice a été un des premiers lecteurs de mon chef-d’œuvre. « Émouvant et remarquablement écrit », d’après l’éditrice. Mais peut-on croire une petite éditrice ? J’aurais dû proposer mon manuscrit à Gallimard ou au Seuil ! (vous aurez compris que je plaisante). Le 9 mai, Patrice  m’écrivait :

« J’achève de lire Le vieil homme qui se souvenait… et je ne résiste pas à l’envie de vous dire combien ce livre m’a enthousiasmé. Un enthousiasme qui provient peut-être du fait que je vous connais et que j’ai été heureux de découvrir votre enfance et l’univers dans lequel vous avez évolué. Explication insuffisante : n’importe quel lecteur peut se laisser prendre par la main et vous suivre dans cette évocation.

Cela tient d’abord au style que vous avez adopté : simple, proche du langage oral, vulgaire parfois (il faut appeler un chat, un chat et la merde, la merde), parfaitement adapté à cet environnement du petit. Le second élément qui fait de ce récit une réussite réside dans le procédé arrêts sur images,  flashs, et dans le passage d’une date à une autre, dans la juxtaposition enfin du regard de l’enfant et du vieil homme qu’il est devenu.

Cet apparent désordre nous vaut de passer ainsi des activités quotidiennes d’une vie difficile, à des portraits singuliers (Coco bel œil , Belles fesses, la mal-pendue, Rico), le plus souvent pathétiques ; mais également à de très beaux tableaux : le père et l’enfant, tôt le matin, dans les rues d’une ville ou passant une journée à la pêche ; voire de véritables récits : la mère voulant se jeter dans la rivière, le bicard.

Une manière linéaire de raconter tout cela aurait pu être source d’ennui, l’alternance des époques et des genres crée une dynamique du texte et relance sans cesse l’intérêt. Je n’oublie pas non plus l’évolution du petit et l’affirmation de sa personnalité : du non ! qui arrête la gifle du père à sa décision de faire avec le plomb que la société venait de coller à ses semelles. Une personnalité faite aussi d’une grande attention aux autres et d’une profonde humanité : qualités que le vieil homme a su garder, je peux en témoigner ! Il y aurait beaucoup d’autres choses à dire, tellement ce livre est riche… »

Patrice Angibaud

Après Tant perdu et Les Tessons du temps, Patrice Angibaud publie cette année aux Éditions Gros Textes, Avant que ne se ferme le paysage, recueil au titre hautement symbolique. Vous trouverez toutes informations sur le livre en consultant le site de l’éditeur. 

Quant à moi, je vous invite à découvrir en avant-première deux poèmes de Avant que ne se ferme le paysage. Voilà…

Tu rends visite à ton ami

Le vieil homme

De la maison de retraite

 

Au moment de partir

Tu lui serres doucement

La main en promettant

De revenir

 

Il dit au revoir

À bientôt

 

Visage presque impassible

Si ce n’est l’esquisse

D’un sourire

Qui répond

À ton propre sourire

 

Mais il y a la trahison

Du regard

Dans lequel tu peux lire :

Reste encore

Reste plus longtemps

Ne me laisse pas

 

Face à la solitude

Au silence de l’effroi

Face à la mort

Qui

D’un pas léger de louve

S’approche de moi.

 

***

 

Tu marche et devines

À ce souffle nouveau

Dans ta poitrine

Que pour la première fois depuis longtemps

Le paysage est ouvert

Qu’il suffit de marcher marcher encore

Pour aller au bout de toi-même

Et plus loin et savoir

 

Rien ne compte désormais

Hormis ce sentiment soudain

D’être à hauteur des arbres

Plus libre que la lumière qui s’infiltre partout

Et révèle cette pensée

Clé perdue au fond de la mémoire :

 

Tu aimes cette terre

Toujours renouvelée

Sa puissance de vie

Qui nourrit ton regard

Au point que tu te prends à rire et à sautiller.

 

Patrice Angibaud

 

Lisez, et relisez. La poésie, c’est tellement mystérieux qu’il faut revenir sur ses pas pour ne rien manquer du message. Un poème dit toujours beaucoup plus qu’on ne croit. Et l’ami Yves Artufel, éditeur, attend votre lettre : commandez-lui le livre. 6 € (plus 1 € de participation aux frais d’envoi)

Yves Artufel – Éditions Gros Textes – Fontfourane – 05380 CHÂTEAUROUX-LES-ALPES

Quant à moi, je vous invite à vagabonder dans mon enfance. Période d’incertitudes, de craintes et d’espoir, de lutte pour survivre. C’était la guerre. Occasion aussi de présenter un tableau de la vie quotidienne à cette époque. Tellement différente de la nôtre aujourd’hui.

Vous pouvez commander le livre à :

Largevision Éditions

diffusion distribution Encre Bleue éditeur

66 avenue Franklin Roosevelt

11000  CARCASSONNE

Accompagner la commande d’un chèque de 27,10 € (23 € +4,10 € de port) à l’ordre de Largevision Éditions.

 

Sur la photo, le désordre de mon bureau, mais ne vous y trompez pas : désordre organisé. Sous le livre de Patrice, le manuscrit du livre en cours d’écriture. Trente-neuf pages déjà. Ça devrait faire un gros bouquin. J’espère qu’il ne restera pas dans un tiroir, comme Yves en hiver, un roman que je n’ai jamais eu le temps de réécrire (réécrire… parce qu’on fait des progrès, quand même, en 50 ans !)

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Je reviens sur mes chemins de lecture   

Libéré de cette revue qui me volait tout mon temps, lassé par les flatteurs dont les lettres tombaient par paquets dans ma boîte, et dont les mails inondaient l’écran de mon ordinateur, je vois avec plaisir ( ? ) s’installer un silence propice au travail. L’ingratitude est une grande qualité humaine. Seuls, quelques amis continuent de m’accompagner dans mon parcours d’écrivain toujours dans un état de doute – ce qui m’a fait jusqu’à ce jour changer d’éditeur pour chacun de mes livres afin de passer à chaque fois l’examen et de me rassurer – ceux-là, je les remercie, leur présence, même lointaine, est un grand encouragement alors que je reviens avec appréhension sur mes chemins de lecture.

Depuis mes 7 ans, qui me virent plongés dans un petit bouquin de contes, jusqu’à ces derniers temps, où j’asséchai mon budget livres pour acquérir Les Œuvres complètes de Louis-René des Forêts, celles de Georges Perros et le Journal de Matthieu Galey, trois énormes bouquins (Respect, Messieurs : ça, c’est ce qu’on appelle une œuvre !) et le Pléiade de Philippe Jaccottet (une somme : d’un intérêt inépuisable), d’autres aussi : le Journal de Philippe Delerm, léger, et l’indigeste Vous écrivez ?  d’Arrou-Vignod qui vous assomme de banalités présentées comme des découvertes – depuis ce temps, donc, les années se sont succédé. Avec des bonheurs de lecture, des rencontres exceptionnelles. Pour moi qui n’aurais pas fait 100 mètres, ni même un seul pour avoir une dédicace de Ronaldo ou de Barthez (quoique lui…), des lettres de Roger Martin du Gard, de Marcel Arland, d’Henri Troyat, d’Hervé Bazin, de Julien Gracq (il y en eut beaucoup d’autres) c’est l’inestimable trésor que m’ont apporté les années.

Et j’ai entrepris de parcourir à nouveau cet exceptionnel chemin de lecture qui a été l’occasion de revisiter les lieux de vie et d’écriture de tous ces auteurs. Il y a, dans les maisons d’écrivains, quelque chose d’indicible qui flotte, même dans celles où il n’y a plus rien, comme la Tour de Montaigne, par exemple.

Un livre, à la demande d’un de mes éditeurs. Et je ne suis pas sûr de répondre à son attente. Trop personnel, peut-être. Le manuscrit commence par cette phrase : «  Chez mes parents, il n’y avait pas de livres… », alors que dans la maison de notre retraite ils ont envahi les deux bureaux, occupent tout un mur du salon, squattent les chambres et la salle de jeux de l’étage. Un livre, donc, à venir. Le dernier, peut-être… Qui sait ?

 Et maintenant une ou deux pages de mon journal– la première, étrange, un jour d’orage dans ma tête… Je n’étais pas très gentil avec mes semblables.

 20 juin 2017– Ce type – un vieux, déjà – venu à la maison de la presse de Sablé (c’était dans les années 70 sans doute) dédicacer son bouquin, un roman larmoyant. Très digne, quand même, dira-t-on. Sujet sensible. Assis à une petite table. Bataille, il s’appelle. (« s’appelait : il doit être mort maintenant) Michel, peut-être – et son livre : L’arbre de Noël (quelqu’un en a tiré un beau film avec Bourvil, merveilleux acteur, aussi bon dans le tragique que dans le comique – un film à faire pleurer dans les chaumières.) « J’ai pleuré, oh, j’ai pleuré… » c’est comme ça que ça commence, je crois – pas le temps de vérifier, le bouquin est quelque part sur les rayons, à la lettre B, là-haut, près du plafond et il faudrait que je prenne l’escabeau – dangereux à mon âge ! Je m’y risque pourtant de temps en temps. Un type aux cheveux gris, à la table. Je m’approche, lui parle. Il me fait répéter… une fois, deux fois. « Pouvez-vous parler plus fort ? Je hausse la voix. Pas suffisant. Il ne comprend pas. Pas envie de gueuler : il y a des gens autour, qui attendent pour une signature du Maître. Il me montre une feuille et un crayon à bille. Sur la feuille, il y a des prénoms et des noms. Nécessaire pour la dédicace, s’il est sourd comme un pot, mais indiscret. Gênant pour moi qui suis un vieux Sabolien : j’en connais beaucoup, de ces braves gens dont le nom figure sur le papier et qui voulaient un mot écrit de la patte de l’écrivain. Pour le montrer fièrement à leurs copains, à l’heure de l’apéritif. Comme je ne veux pas ajouter mon nom sur la feuille et que je veux quand même qu’il écrive quelque chose – c’est maladif chez moi, cette quête de la dédicace – je sors ma carte d’identité. Il se penche sur le carton. Est-ce qu’il serait myope, en plus ? je trouve qu’il approche son nez bien près de la carte. Bon, il écrit. Je paie et je pars.

À la maison, j’ouvre le bouquin, un beau livre relié, cartonné de rouge (non : « cuiré », devrais-je dire, le carton est couvert d’une peau, c’est du luxe). Je lis les pattes de mouche du bonhomme : « Pour Claude Cailleau, en témoignage d’estime et avec les meilleures pensées de… » Au-dessous, un gribouillis qui doit être sa signature, et la date.

Il ne me connaissait pas, ce vieux type. Comment pouvait-il savoir si j’étais (je suis) « estimable » ? Quant à ses pensées à mon égard… Il se foutait bien que je me fasse balancer par une bagnole en sortant de la boutique avec son bouquin. L’essentiel, c’était que je l’aie payé , ce qui lui vaudrait, à lui, son petit droit d’auteur. Peut-être qu’il attendait ça pour remplir son frigo, acheter sa douzaine d’œufs chez son crémier. Je me suis dit : Quelle connerie, les dédicaces ! Ce qui ne m’a pas empêché de dédicacer à mon tour, plus tard. Et d’écrire pour tout le monde la même chose. Sauf aux amis proches, bien sûr. Mais… dans les salons il m’arrive de dire à un acheteur qui me demande une dédicace : « Vous savez, j’écris comme un cochon. Et ça ne va pas donner plus de valeur au bouquin. » Minute de vérité. Certains acceptent que le livre reparte vierge, d’autres s’obstinent… et je signe !

Sur le livre de Bataille, que finalement j’ai repris en main, on lit au début : « Nul n’a pleuré plus loin que moi… » Quand je vous disais que c’est larmoyant.  Mais sa phrase est plus belle, plus accrocheuse  que la mienne. On a envie de continuer.

Voilà mes pensées ce matin, telles qu’elles me sont venues, de vieux souvenirs plutôt, dans le désordre d’un esprit non contrôlé. Transcrites au fur et à mesure qu’elles naissaient. Pour plus de naturel. C’est toujours ainsi qu’il faudrait écrire son journal. Des phrases décousues, sans aménité. Sincères, donc. L’Arbre de Noël a retrouvé sa place sur le rayon, là-haut, hors de portée. Il dort, depuis, son sommeil de bouquin oublié.

Je pensais glisser là une deuxième page, mais ce propos de juin 2018 est déjà assez long. Une autre fois, peut-être…

Dehors, les roses éclairent à nouveau le bord de la cour et le chèvrefeuille sauvage a envahi la haie.

 

À vous tous, bonnes vacances !

 

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( 2 mai, 2018 )

Printemps 2018 : une revue, un livre…

Oui, les Cahiers de la rue Ventura ont vécu. Mais mon autobiographie paraît ce mois. Une mort, une naissance : allons, tout n’est pas perdu.

Parlons du livre, d’abord. Mes lecteurs le savent, tous mes textes longs ont une base autobiographique. Certaines pages de l’ouvrage ont été écrites dès les années 1990, alors que je n’avais pas encore décidé de publier à nouveau. En 2002, préparant un dossier « Récit d’enfance » pour la revue La Faute à Rousseau, Philippe Lejeune m’avait sollicité pour un texte que j’ai intitulé « Je lui parlerai du petit… » Je reproduis ici la première partie de l’article parce qu’il explique bien les aspects de mon projet et mes premiers essais pour le réaliser.

Ecrire son enfance.

  Je n’avais rien prévu. Aucune recherche préalable. (J’ai pourtant quelques archives, et des photos.) Un jour, j’ai pris mon vieux stylo – le même depuis dix ans – et j’ai commencé.

  Ce qui est venu au bout de ma plume  -  et je n’y pensais pas trop  -  c’est une sorte de poème, des lignes interrompues arbitrairement, mais chargées d’images, comme en poésie. Court. Quelques lignes, avec une chute, comme dans une chanson. Le lendemain, même démarche, même résultat. Je ne savais pas que j’avais commencé d’écrire mon enfance.

  Ces textes ? De tout petits flashes, de brefs souvenirs, que je n’avais pas envie d’exploiter plus profondément. Je les recueillais tels qu’ils me venaient, surgis de cette nuit profonde dans laquelle s’est noyée notre enfance. Je n’avais souci d’aucun ordre. Dans l’un des textes, j’avais 3 ans, âge de mon premier souvenir, dans le suivant : 10, dans le troisième : 5. Un puzzle, je rassemblais les morceaux d’un puzzle.

  Puis j’ai commencé à relire ce que j’avais écrit. Et je me suis aperçu d’une chose étrange : de texte en texte  -  je les appelais alors des pavés  – j’étais passé de la photo au film. Je veux dire que les scènes figées du début laissaient peu à peu place à de brefs récits où le personnage ne posait plus, mais agissait.

  Revenant alors sur les premiers textes, je les ai accompagnés de développements qui prenaient un tour narratif. Quand j’ai eu pris conscience du problème que représentaient les premiers pavés pour la cohérence de l’ensemble, ces ajouts n’ont plus été nécessaires. J’étais parti pour un voyage au long cours qui me ramenait plus d’un demi-siècle en arrière.

Cet enfant des années quarante, peu à peu je lui redonnais une existence. Je retrouvais ses craintes, ses hantises même ; ses pauvres joies de môme solitaire. Entouré mais seul. Je l’aimais bien, ce gamin de la guerre et de la rue. En lui je me reconnaissais. Ses expériences, ses succès, ses échecs, jour après jour, se sont gravés en moi, dans une mémoire stagnante, sortes de sédiments-souvenirs dont je me suis nourri pour vivre.

Cl. cailleau, La Faute à Rousseau n° 32, février 2003

Pour titre, depuis toujours j’avais choisi une expression très sèche : Mémoire vive, pensant à cette enfance toujours présente dans ma mémoire. L’éditrice a proposé Le vieil homme qui se souvenait... J’ai accepté.

Je suis donc heureux de vous annoncer la sortie du livre en ce début de printemps. Mon enfance et mon adolescence, pendant et après la guerre (de 1939-1945). Période d’incertitudes, de craintes et d’espoir, de lutte pour survivre.  Occasion aussi de présenter un tableau de la vie quotidienne à cette époque, si différente de la nôtre.

Vous trouverez ci-dessous une présentation du livre. Je précise que la 4ème de couverture a été rédigée par l’éditeur. Seul le premier texte est de moi. Ceux qui me connaissent sauront que je n’aurais pas pu écrire la suite.

L’ISBN est précisé : si vous souhaitez m’accompagner dans cette évocation de « l’enfant que j’étais », vous pourrez commander le livre chez votre libraire ; mais aussi sur le site de Large vision éditions Encre Bleue où il est proposé avec une réduction de 5%. L’objet est beau, composé de feuillets cousus collés, avec un papier anti reflets, pour faciliter la lecture. N’étant plus très jeune, j’ai pensé aux lecteurs âgés, parfois malvoyants. Mais qui voit bien peut aussi lire…  Votre confort de lecteur n’en sera que meilleur.

Le vieil homme qui se souvenait… Claude Cailleau,

Éditions Encre Bleue, collection Largevision, histoires de vie

ISBN : 978-2-84379-754-5

Vous trouverez tout cela sur le site de la Maison d’édition.

Livre 2

La défunte revue, maintenant…

À mes élèves de troisième, je disais : le style, c’est l’art d’utiliser la langue. Définition un peu sèche, mais je donnais un exemple. Vous savez… Quand vous voulez dire que quelqu’un est mort, vous pouvez écrire : « il est décédé » (c’est un constat, sans plus – mention d’état civil). ou : « il s’est éteint » (vous atténuez : une mort douce, peut-être, après une longue lutte pour survivre) Ou encore : « il a péri » (une mort violente) Ou : « il vient de disparaître » (comme si on avait peur d’énoncer le fait dans son aspect définitif) ou enfin, mais on pourrait imaginer d’autres formules : « il a vécu » ( en insistant sur la perte du bien précieux qu’est la vie, avec ce passé composé d’une action terminée), ou « il n’est plus » (un peu maniéré – délicatesse et préciosité). Quant au Robert, il dit que le style est « l’aspect de l’énoncé qui résulte du choix des moyens d’expression déterminé par la nature et les intentions du sujet parlant ou écrivant » (citation de P. Guiraud). J’imagine l’attitude de mes élèves, se grattant la tête, débordés par les mots. Cette définition du Robert, pourtant, me semble presque parfaite, n’était la phrase qui s’étire, s’envole dans l’abstraction.

Quant je dis : « les CRV ont vécu », on voit bien que la formule a été pesée. Je n’écris pas : « ils s’arrêtent », ce qui supposerait que je ne suis pour rien dans cette fin – ou : « ils ont coulé » (ce qui supposerait une lutte contre des éléments déchaînés avec pour dénouement le naufrage). Non, pas de tempête au sein des Cahiers, tout allait bien. Aux amis, j’ai écrit : « Je coulerai les CRV en juin 2018 », ce qui montrait que la décision, c’est moi qui l’ai prise, plus d’un an avant l’événement, d’ailleurs,  et celui-ci a même été avancé : le n° 40 est parti en avril vers les abonnés. Il faut dire que pour la Revue, nous travaillions par anticipation, souvent un an avant la sortie d’un numéro.

Les Cahiers ont vécu, donc. On ne versera pas pour autant une larme : elle serait hypocrite. Satisfaction (autosatisfaction, corrige Claude Vercey qui la trouve gênante). Je ne dirai pas cela. Je suis un homme modeste ; quand des poètes reconnus me confient des textes, je m’émerveille comme un enfant. C’est que je ne me prends pas pour un personnage important. Je suis heureux sur l’instant et je le dis. Simplement. Naïvement. Autosatisfaction… dire cela, c’est mal me connaître. Je parlerais plutôt de reconnaissance. Mais, quand je regarde les quarante numéros sortis en 10 ans, permettez-moi de trouver que, quand même, ce n’est pas si mal – et de le dire. En remerciant tous ceux qui m’ont aidé dans cette tâche ingrate.

Bon ! Parlons du Cahier 40. Le 39 est épuisé. Nous avons même dû réimprimer. Le 40, vous pouvez encore le commander, aux conditions habituelles (6 €, port compris), mais seulement jusqu’au 30 juin. Le budget de l’Association sera clos à cette date.

Et il est original, ce dernier numéro : vous y trouverez, outre une importante étude sur la poésie contemporaine de Gérard Mottet (les paradoxes de la poésie),  des textes inédits de Mathieu Bénézet, Jean Orizet, Jean-Michel Maulpoix, Marc Alyn, Marie-Claire Bancquart, Antoine Emaz, Alain Duault, Jean-Pierre Lemaire, Richard Rognet, Monique Labidoire, Jean-Claude Pinson.

Et ceux des amis : avec Monique Labidoire précédemment citée, François Baillon, François Magne, Jean-Marie Alfroy, Danièle Corre, Jean-Louis Bernard, Philippe Fouché-Saillenfest, Pierre Garnier, Michel Diaz. Ce dernier m’a consacré une chaleureuse « Lettre ouverte à Claude Cailleau ». Sans oublier Patrice Angibaud, fidèle lecteur et ami, qui donne sa lecture du 451ème Encres Vives. Tous ces noms pour un seul numéro : je prévois un sourire sur le visage de Claude Vercey quand il va tomber sur ces propos : le directeur des Cahiers est content de lui, certes, mais ne portons pas de jugement sur cette réaction. Chacun de nous est une énigme – moi, plus que quiconque : mon « côté mystérieux, un peu sphinx », c’est Jean-Marie qui le dit, fort justement, dans une lettre – interpréter un comportement, c’est s’aventurer sur un terrain glissant. Sans rancune, Claude ; je te remercie d’avoir assuré à plusieurs reprises la présence de ma revue et parlé de mes livres sur le site de Décharge.

Je vous parlais il y a un instant de Jean-Marie Alfroy. Il a créé récemment un blog dans lequel il parle avec maestria de littérature, et d’art en général.  Je vous conseille de visiter ce blog : on en sort toujours enrichi.

Je vous quitte sur ce conseil. Prenez soin de vous, comme le dit Samuel Étienne, l’animateur de l’émission « Questions pour un champion ».Et que le printemps vous soit favorable !

Cl. C. (Souhait empreint de naïveté : mon rêve serait qu’on me reconnaisse à mes seules initiales. Reverdy, lui, signait ses dédicaces d’un simple P R )

Couv 40

( 25 février, 2018 )

Février 2018 : Bientôt la fin.

Vous le savez, chers amis des Cahiers, la Revue va s’arrêter au n° 40.

« Avant le premier numéro d’une revue, il y a toujours une histoire », écrivais-je en 2011 sur la première page de mon blog. La mienne fut assez exceptionnelle. Les amis qui m’ont suivi dans mon travail, à travers mes livres, le savent, qui ont lu mon Cocktail de vie (Éditinter) et Cl. C. un parcours littéraire atypique (451ème Encres Vives). J’ai fait, dans ma (déjà) longue vie, des rencontres extraordinaires, et vécu avec mes élèves des expériences hors du commun. Ma revue est née de tout cela.

Pour les deux derniers numéros, j’ai ressorti de vieux dossiers, repris des contacts, fait jouer des relations qui dataient des années 80-90. Bref, ce fut, cette fois encore, un grand plaisir et beaucoup d’émotion. Quand Monsieur Jaccottet vous autorise à publier dans votre modeste petite revue une lettre qu’il avait adressée à vos élèves en 1991, que dire sinon que vous êtes comblé. Bref, le Cahier 39 dont voici le sommaire devrait rester dans les mémoires.

Pour ce dossier sur l’écriture de la poésie,

Philippe Jaccottet répond à l’enquête des collégiens d’Ingrandes-sur-Loire.

Des poètes disent comment ils écrivent et proposent un de leurs poèmes. Ont collaboré Jean-Marie Alfroy, Pierre Perrin, Michel Diaz, Michel Passelergue, Claude Serreau, Bruno Thomas, Jean-François Forestier, Paul Couëdel, Jean-Claude Touzeil, Jean Pichet.

Noël Arnaud, en 1991, répondait aussi à l’enquête dans une lettre restée inédite jusqu’à ce jour.

Dans la 2ème partie du n° 39, nous avons, comme d’habitude, accueilli des poètes contemporains habitués des Cahiers et quelques nouveaux. Puis une savoureuse page d’enfance de Pascale Lavaur (humour et émotion), quelques notes de lecture et quatre pages intitulées « Rue Ventura ». Je livre là quelques impressions de lecture. Ces pages préfigurent ce qui viendra après la Revue. Car je n’imagine pas d’abandonner tout contact avec ceux qui m’accompagnent depuis les débuts et que j’appelle « Les Amis de la rue Ventura ». Affaire à suivre, donc !

Mon ami Patrice est de ceux-là. Il vient de m’adresser sa lecture de ce numéro un peu exceptionnel. J’ai plaisir à vous en proposer un fragment ici :

« Cher Claude, un grand merci pour … ce n° 39 des Cahiers. Le sommaire de couverture est impressionnant et, surtout, subtilement structuré. Riche idée que d’ouvrir le dossier « Des poètes disent comment ils écrivent » par la réponse de Philippe Jaccottet à vos élèves d’Ingrandes-sur-Loire en 1991 et de le clore par celle de Noël Arnaud la même année. Deux documents portés ainsi à notre connaissance, deux conceptions quasi à l’opposé l’une de l’autre mais, somme toute, complémentaires, puisque balayant bien l’immensité du champ que peut recouvrir l’écriture poétique.

Entre ces deux grands aînés, j’ai beaucoup apprécié le témoignage de l’ensemble des auteurs 2018. Simplicité et profondeur des propos de chacun… Mention particulière, en ce qui me concerne, pour Michel Diaz et Claude Serreau – Je retiens également, au passage la réflexion de Pierre Perrin (page 8) : « … Mais  surtout la recherche du nouveau par la table rase a perdu de vue non seulement l’efficacité sur le lecteur, mais jusqu’à la nécessité du sens. Ce qui prime aujourd’hui, c’est l’évanescence, le dit du rien, tout rythme, toutes images répudiés (…) » – réflexion qui, d’une certaine façon, rejoint la vôtre (page 60) : « Poètes, pourquoi pensez-vous que, pour écrire en poésie, il faut mettre de l’obscurité dans la phrase ? » -  Aucune obscurité dans ce dossier dont j’aime qu’il se termine par : « Je cherche l’apaisement », Jean Pichet touchant là, je crois, ce que nous cherchons pratiquement tous en écrivant…

… Joie, par ailleurs, de retrouver Michel-François Lavaur dans les deux pages, si justes, de Pascale. Et joie, aussi, que de lire l’analyse pertinente que livre Michel Passelergue sur votre Crépuscules. Et merci à vous, Claude, d’avoir publié la note de lecture que Claude Serreau a consacrée à mes Tessons… »

Merci, Patrice. Je ne manquerai pas de prévenir les amis lorsque sortira votre prochain livre.

Voici, pour éclairer mon propos, la première de couverture du Cahier n° 39…

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Dans le Cahier n° 40, à paraître en mai ou juin, je pensais publier un texte que j’avais rédigé il y a quelques années, fruit de mon expérience de revuiste. Mais, devant l’importance des textes recueillis pour ce dernier numéro (le fichier est déjà prêt sur mon ordinateur), je me suis effacé. Cependant…

Retour sur un thème pour lequel j’ai beaucoup radoté, voici, extraits de cette « Lettre à un ami sur la poésie » un fragment dont la charge fera sans doute penser au combat que menait Jacques Charpentreau dans le cadre de sa revue Le Coin de table. Si je propose ce commentaire pour la seconde fois, c’est que, pour moi, le sujet est important. Il faut sauver la poésie !

« … Quand je lis « J’ai égaré ma vie à travers l’aveugle succession des jours… mot après mot dans le vertige de l’écriture j’ai tenté vainement de combler l’horreur du vide de me frayer un chemin au cœur de la douceur des choses », je m’interroge : est-ce de la poésie ? Pourquoi ne pas dire que ce n’est que de la prose ? Il y a des images, cependant. Mais n’a-t-on appelé cette phrase poésie que parce que l’auteur a égrené ce message sur 17 vers ! Oui, vous avez bien lu : 17 vers, très brefs. On a l’impression qu’étant, comme les feuilletonistes du 19ème siècle, payé à la ligne, il voulait gagner son pain du lendemain. Il faudrait d’ailleurs  se mettre d’accord sur ce qu’on appelle poésie. Mission impossible, nous le savons tous. Reste que le souci du poète devrait être, après son besoin de dire (qui est sans doute l’essentiel), le respect du lecteur. Est-il bon de le heurter, le choquer par quelque chose qui ressemble à une escroquerie ? Emporter l’assentiment de son lecteur, n’est-ce pas important, autant que le message, pour qui souhaite être lu, écouté, compris ? Dans le texte cité ci-dessus, je ne vois rien d’autre que la volonté de faire des vers (disposition qui, ici, n’ajoute rien au message) et un jeu gratuit sur « l’affreux peigne à dents cassées du vers libre ».

Quand je lisais pour la Revue des poèmes en prose tronçonnée, parfois j’étais tenté de les jeter dans ce que Jacques Charpentreau appelait le « monceau de vers libres qui s’accumulent dans les déchetteries de la poésie ».

Dans le même numéro du Coin de table, il ajoutait : « Le vers libre est apparu aux médiocres comme la possibilité de s’affranchir totalement de toute structure… il a ouvert une autoroute aux médiocres qui n’ont pas vu ses exigences ». Il avait la dent dure, le poète. Mais il faudra bien reconnaître un jour qu’il avait raison.

Sur ce, je vous quitte aujourd’hui.  Après la pluie, le soleil se lèvera, chantait Franck Fernandel dans « La caravane Pacouli », ce sympathique feuilleton  dont l’action se déroulait en Provence. Il est bien là ce matin, le soleil, pour le plaisir des amateurs de promenades poétiques, livre en main, quand le rythme de la marche vient épouser celui du poème. N’est-ce pas, Michel, vous qui, dans votre lettre ouverte à Cl. C. qui va paraître dans le Cahier n° 40 dites qu’il vous arrive d’emporter un de mes livres dans vos marches « sur les chemins… à l’heure incertaine du crépuscule ».

Louna, génie des lieux, rue Ventura, et son maître vous saluent et vous souhaitent un beau printemps de création, ensoleillé par la poésie.

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( 8 novembre, 2017 )

Un entretien, occasion d’un bilan (6 nov. 2017)

Chers amis, habitués du blog, Vous qui, de temps en tems, poussés par une amicale curiosité, vous accordez une petite promenade dans mon blog, voici un lien pour suivre l’entretien que m’a proposé Jean-Louis Riguet, membre de la Société des Gens de Lettres et du Bottin international des Professionnels du Livre et Sociétaire de la Maison des Écrivains et de la Littérature.

Je remercie Louis Riguet de m’avoir permis ainsi de parler de mon travail d’écrivain et de revuiste. Ne croyez pas que cela m’ait donné la grosse tête. Non, vous me connaissez suffisamment pour savoir que ce n’est pas mon style. Je suis simplement heureux de vous faire entrer dans mon environnement culturel, dans cet univers que j’ai peu à peu créé – heureux de communiquer, de venir parler avec vous.

Voici le lien… Et bonne lecture. Ensuite, eh bien, je reste à votre écoute, si l’envie vous prend de commenter mes réponses.

https://librebonimenteur.net/2017/10/31/jl-a-lecoute-de-claude-cailleau/

La photo ci-dessous, c’était il y a quelques années, dans le bateau d’un officier de la marine à la retraite, devant l’île Saint Michel. Celle-ci se dresse à quelques mètres au-dessus du niveau de la mer, à l’entrée de la rade de Lorient. Elle m’a toujours fasciné avec ses constructions inachevées, ses ruines et l’absence de toute vie à sa surface. Pourtant, au Moyen-Âge, l’île a abrité un prieuré, puis un lazaret au 19ème siècle : on y déposait les lépreux au retour des pays lointains, par crainte de la contagion, avant de venir accoster à Lorient. Pendant la guerre 1939-1945, les Allemands l’avaient minée. Nettoyée de tous ses explosifs, l’île sert de temps en temps aux manœuvres de l’armée. Elle est toujours propriété de l’amirauté de Lorient. Le  personnage principal de mon roman Yves en hiver ( encore à l’état de manuscrit), recherché par la police, s’y réfugie, aidé par un ami. Actuellement, il est interdit d’aborder sur l’île Saint Michel.

Mon ami Louis, illustrateur des Cahiers de la rue Ventura, s’est servi de cette photo pour faire le dessin qui orne la couverture du 451ème Encres Vives Claude Cailleau, un parcours littéraire atypique.

Bonne lecture de l’entretien et à bientôt.

Claude

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( 15 octobre, 2017 )

Automne 2017. Pluie et soleil : les caprices du temps

Le Cahier 37 est paru, avec son dossier sur le Nouveau Roman, ses pages de poésie, des études sur Maurice de Guérin et sur Albert Camus, les pages d’enfance de Pierre Borghero et Pascale Lavaur. Pascale est la fille de Michel-François Lavaur, disparu en 2015, facteur d’une revue (Traces) qui dura 50 ans et dans laquelle MFL (c’est ainsi qu’il signait ses lettres à ses amis) publia beaucoup de jeunes poètes qui, ensuite, allaient se faire un nom dans le paysage poétique du 20ème siècle. J’avais consacré un dossier à Michel dans le n° 17 des CRV, reproduisant, au milieu, le charmant désordre qui régnait dans les pages de Traces – désordre qui rendait la revue sympathique et … inimitable. Il est vrai aussi que, depuis, l’ordinateur est venu aider considérablement les revuistes dans leur travail.

Dans le 38, qui va paraître en novembre, notre « invité de l’automne » est Pierre Perrin, et vous pourrez lire une belle étude de Mireille Privat (Université de Brest)  sur Victor Segalen, suivie de fragments de Stèles (Poésie Gallimard).

Dans sa revue en ligne Texture, Michel baglin publie une note de Georges Cathalo sur le Cahier 37. Et comme, parlant de ce mouvement littéraire qui « fit long feu » (le mot est de Jean-Marie Alfroy, qui s’en explique dans le dossier) j’avais dans mon texte volontairement glissé vers la littérature personnelle qui, parallèlement, s’était faite plus présente, parlant du Nouveau Roman, le critique écrit : « C’est avec une grande pertinence et une belle objectivité que Claude Cailleau décortique ce phénomène pour aboutir à un constat réaliste sur cette « drôle d’idée » que de vouloir « associer l’école du regard et le regard sur soi ». C’est toujours agréable à lire, pour l’auteur qui s’est évertué à remplacer au dernier moment un collaborateur défaillant. Pour comprendre et en savoir plus, je vous invite à demander ce numéro si vous ne l’avez pas encore lu, contre un chèque de 6 € aux Amis de la rue Ventura (adresse sur le blog, en descendant dans les pages). En avant-première, voici la première de couverture du Cahier 38, en préparation :

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Un ami des poètes nous a quittés au printemps : Éric Jacquet-Lagrèze. patron des Éditions Tensing. Pour ceux dont il publiait les textes, ce fut un grand moment d’émotion. Éric était d’une gentillesse et d’une efficacité remarquables. Il s’était mis véritablement au service de ses auteurs. Sa Maison disparaît avec lui. Les contrats ont été repris par une éditrice dont les exigences et le contact sont si peu sympathiques que je lui ai demandé immédiatement d’oublier mon nom et mon petit livre. Et je constate, aux courriels qui s’échangent, que je ne suis pas seul à ne pas accepter les propos de cette éditrice qui traite les auteurs de Tensing avec aussi peu d’égards.

Une maison d’édition qui disparaît, ce sont des livres qui meurent. Ils cessent d’être en vente. C’est ce qui arrive, entre autres au recueil Murmures de l’absence  de Gérard Mottet, membre du Comité des Cahiers, et à mon Je, tu, il. Nous avons récupéré chez l’éditeur les exemplaires restants. Si vous souhaitez acheter le livre de Gérard Mottet, adressez-vous aux Amis de la rue Ventura ( < amis.rueventura@hotmail.com >) Ils transmettront. Pour le mien, vous savez comment faire.

Quant à moi qui en ai fini avec la poésie, je vous prépare sur le sujet un beau numéro de ma revue, à paraître en mars 2018. Un numéro qui devrait faire date dans la série des Cahiers de la rue Ventura et – pourquoi pas ? – rester dans les mémoires. On peut toujours espérer…

On me demande parfois quelques informations sur mon parcours en poésie, surtout quand j’affirme que je ne vais plus en écrire. L’essentiel en a été dit dans le 451ème Encres Vives ( Chez Michel Cosem – 2 Allée des Allobroges – 31770 COLOMIERS, 6,10 €)et aussi dans mon anthologie « Cocktail de vie » (Éditinter, 16 €). Mais, pour répondre à la curiosité de quelques-uns, voici une bibliographie arrêtée en juin 2017. Rien de nouveau. Peu modestement, je compte sur mes cinq livres de poésie pour m’assurer une survie dans la mémoire collective et surtout (ceux qui le connaissent vont être étonnés) sur celui de mes ouvrages qui peut paraître le plus inaccessible, ce « Crépuscules » dont la phrase de 30 pages ( !) est truffée de notes renvoyant à des « tiroirs », afin d’en éclairer les zones d’ombre. Sans excès, cela va de soi : lueurs plutôt que lumières ; en poésie, il faut toujours (mais la chose se fait naturellement) ménager un peu d’ombre pour laisser le lecteur interpréter à sa façon le message. Si le poème ne réussit pas à faire du lecteur un créateur, le pari est perdu.

Dans le Roman achevé, poème (oui, au singulier, le mot) de 92 pages, j’ai écrit, à propos de l’œuvre de Saint-John Perse : « Le poème est une maison. Mais comment dépasser le mirage des portes, au tréfonds de la langue apprivoiser l’énigme ? »

Me réjouit l’idée que ce Crépuscules  est déjà dans la bibliothèque de lecteurs cultivés, amateurs de poésie, qui transmettront leur bibliothèque à leurs descendants jusqu’à ce qu’un curieux, sortant le livre des rayons, fasse revivre le vieux poète (comme je le fais de temps en temps de l’énigmatique Mallarmé qui a fasciné l’adolescent des années 50 au point que des sonnets dits hermétiques sont restés à vie dans sa mémoire !) et si le nouveau lecteur était un éditeur, pourquoi, en ces temps lointains,  ne tenterait-il pas une nouvelle publication ? On a vu des choses plus extraordinaires.

Donc, en attendant de pouvoir feuilleter mes « Œuvres poétiques complètes » (c’est en projet. J’avais d’abord pensé à une anthologie, ce qui supposait un choix, puis je me suis ravisé… jusqu’à ce que je revienne – qui sait ? – à l’idée d’une anthologie), vous pouvez vous promener dans ma bibliographie.  La voici…

 

Claude CAILLEAU                Bibliographie 2017

 

Stef et les goélands, roman, Editions Julliard, Prix P. Flat de l’Académie Française – épuisé.

                               des fragments dans Océan d’Armorique, aux Editions Hachette – épuisé.

 Dans les plis du silence, poèmes, Le Pré de la Roche 1999 –

                                           ce même recueil enrichi de manuscrits et tiré à 6 exemplaires, 2002

 Cheminement, poèmes (Editions Encres Vives, 2002)

 La longue route, poèmes, Editions Encres Vives 2003 – bilingue (français et anglais)

 Tout ce qui reste, poèmes (Editions Traces, 2003 – bilingue (français et anglais) (épuisé)

 Un jour ou bien une nuit, poèmes illustrés par M.T. Mekahli, Ed. Encres Vives, 2004

 C’est ma vie, c’est la tienne, album de poèmes pour enfants, Editions GRANDIR, 2004

 Les Cocrouillés, recueil à trois voix, Editions du Petit Pavé, 2004 (épuisé)

 La Croix d’or, roman pour adolescent, Ed. du Petit Pavé, 2004 (épuisé)

 Pour une heure incertaine, poèmes en prose, Editions Sac à Mots, 2005

 Quelques instants,  Editions Encres Vives, 2006 – illustrations de Michel-François Lavaur

 Dans les pas de Pierre Reverdy, essai biographique, Ed. du Petit Pavé, 2006

 Avec le temps…  poème ( livre d’artiste – cl. Cailleau et M.T. Mekahli) Le Pré de la Roche, 2007. (épuisé)

 Des Mots pour vivre, album de poèmes pour enfants, peintures et collages de M.T. Mekahli

                                    Une version anglaise (Trad. de D. Echard) : Words to live

                                     et un guide de lecture pour les professeurs (l’ensemble en 2009)

 Mots du jour et de la nuit, classic poems,  Editions du GRIL, 2009, réédité par Les amis de la rue Ventura

 Le Roman achevé, poème, Ed. du Petit Pavé, 2009

 Litanie des jours aveugles, poème (Multiples, 2010)

 Les Nymphes de l’océan, roman pour enfants, illustrations de Claudine Goux, 2012

 Cocktail de vie, anthologie (Éditinter, 2013)

 Sur les Feuilles du temps, poèmes (Éd. écho Optique, 2013)

 Et je marche près d’Elle… , récit (Éd. Durand-Peyroles, 2013)

 Crépuscules, poésie, Les CRV, 2015

 Claude Cailleau, un parcours littéraire atypique, 451ème Encres Vives

 Je, tu, il – remonté le temps, sondé le silence, poèmes en prose, Éditions Tensing, 2016

 Le Cahier retrouvé, récit , Les Amis de la rue Ventura, 2017

 

Claude Cailleau a collaboré

           aux anthologies des Editions Donner à Voir

           à Vous avez dit Poésie, anthologie (Ed. Sac à Mots) 

          à Pierre Reverdy et l’Ecole de Rochefort (ouvrage collectif paru aux Presses de l’Université d’Angers    en 2008) 

           et à  René Guy Cadou et l’École de Rochefort  (P. U. d’Angers, 2013)

           aux anthologies du Printemps des poètes de Durcet

De nombreuses revues l’ont accueilli dans leurs pages : Le Nouveau Recueil, Friches, Arpa, 7 à dire, les Cahiers de l’Archipel, Jointure, Littérales, Encres Vives, Les Amis de Thalie, Traces, Les Cahiers de la Baule, Inédit Nouveau, Ici et là, Le Coin de Table, An Amzer, Poésie Première, La Faute à Rousseau, Vocatif, etc.

 Un numéro de la revue D’écol’ lui a été consacré en 2004

 Il est l’auteur de Mémoire vive, paru en feuilleton, en 2006, dans « Les Nouvelles », hebdomadaire du Maine,

et dirige actuellement « Les Cahiers de la rue Ventura », revue littéraire.

 

Je, tu, il – « Remonté le temps, sondé le silence »

Une longue note de lecture sur mon livre paraît dans la revue Chemins de traverse de septembre. Elle est signée Michel Diaz., lecteur fidèle de mes élucubrations en poésie. Il me dit souvent que mes vers et mes petites proses se prêtent bien à une lecture en marchant. Ce qui m’émeut. Il me plaît de l’imaginer, dans la campagne en périphérie de Tours, un de mes livres à la main, murmurant à l’oreille des vents, « ces mots qui jouent à la tempête de sable sur mon papier de lune ».

Mais revenons à ce Je, tu, il, et à l’article qui a donné envie à une éditrice que je ne connaissais pas de le lire ! Oui, vous avez bien lu ! Je me suis empressé de le lui envoyer. Et, après lecture, elle m’a fait retour d’une belle lettre, ô combien émouvante pour le vieux poète. Voilà qui ferait oublier les propos agressifs de l’éditrice qui a voulu reprendre les contrats de Tensing.

À Michel, j’avais écrit : « Cher Michel, C’est trop, vraiment ! Je ne sais que dire. Vous y avez vraiment vu tout cela ? Je découvre mon texte à travers votre note. Je m’aperçois que je ne l’avais pas bien lu. Parce que, comme à chaque fois que j’écris, la plupart de ces textes sont venus sans que je sache très bien les décoder. Et les corrections que j’ai apportées aux textes d’origine portaient plus sur la forme que sur le contenu. Venus à des périodes différentes, les plus anciens en 1999, d’autres entre 2000 et 2016. Le plus récent est le dernier, remake d’un poème ancien, complètement modifié pour paraître dans une anthologie ayant pour thème l’arbre. Je ne sais pas écrire sur commande et on m’avait invité à participer. J’ai donc travaillé sur ce vieux texte. Recueil, le livre, parce qu’il est fait de poèmes parus ailleurs, tout seuls, ou restés en attente d’une relecture. J’ai longuement travaillé pour assurer une cohérence à l’ensemble, ces textes n’ayant, à l’origine, aucun lien. Certains en prose, d’autres en vers. Mais il reste, bien sûr, l’unité venue de ce qu’ils ont le même auteur. Qui radote, revient toujours sur ses thèmes de prédilection. Au point qu’il fallait bien finir par arrêter la poésie. C’est fait. Soulagement de l’auteur. Et regret toujours de n’avoir pu faire mieux. »

 Le livre n’existe plus chez les libraires, mais les Amis de la rue Ventura peuvent encore vous l’envoyer contre un chèque de 9 euros à leur ordre. D’avance, merci de le faire vivre encore un peu.

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